Hogwash + Burning Heads – Espace Icare (Issy les moulineaux) – 30 janvier 2014

Comme tous les ans le festival Träce du réseau 92 se tenait dans les salles des Hauts de Seine. Cette année la programmation donnait une large part au rock et l’Espace Icare d’Issy Les Moulineaux mettait à l’affiche deux groupes de hardcore, Hogwash et Burning Heads, reprennant la suite de l’association fahrenheit concerts.

Il en est du hardcore comme d’une course d’endurance : il faut jouer vite et longtemps, et ne pas lâcher l’affaire au bout d’un album. A ce jeu-là, les deux groupes qui jouaient ce jeudi soir se placent en bonne ligne pour gagner la compétition. Hogwash a réussit son pari de chauffer la salle avec 45 minutes de hardcore mélodique à la No Fx. Rien à redire, ils maitrisent leur sujet et font bonne figure si l’on compare avec les groupes US, ça fait du bien d’entendre cette musique et l’on en oublie le look skater décontracté trop évident pour ce type de formation. Hogwash est issu des repérages du Réseau 92, qui effectue un travail important en direction des groupes locaux.

Puis vint le tour des Burning Heads : après 20 ans de carrière, on ne présente plus le groupe hardcore d’Orléans, qui est reconnu dans le monde entier et qui se produit trop rarement en région parisienne à notre goût. Sur scène ils mélangent sans difficulté pour le public présent dans la salle ce soir là le reggae à la Clash et le hardcore le plus incisif, reprenant pour notre plus grand plaisir In The City des Jams. Il est à noter la sophistication des parties de guitare et des Breaks, Burning Heads faisant tout sauf de la musique de bourrin.

Bref nous avons passé une magnifique soirée dans une agréable petite salle de 150 places avec un public calme pour ces artistes qui méritent les grandes salles et les ambiances survoltées.

The B-Sides – The Gaslight Anthem

Après un changement de label et un nouvel album sur Mercury, « Handwritten », voici que leur ancien label Side One Dummy sort une compilation du groupe de New Brunswick.

Les amateurs de ce rock US héroïque musclé et speed, seront surpris par cette compilation qui,  a trois exceptions près, (She Loves You, State Of Love And Trust, et Tumbling Dice – une reprise des Rolling Stone) se compose de titres acoustiques, dépouillés, qui mettent en avant la voix de Brian Fallon.

A l’évidence, Side One Dummy a fouillé dans les tiroirs pour surfer sur l’actualité du groupe. La surprise passée, on retrouve les qualités de The Gaslight Anthem : bonne voix, compositions mélodiques, background folk de ce qu’on ne peut plus qualifier de punk rock tant la formule est rôdée par les groupes qui se sont succédés depuis vingt ans. Loin de leurs albums précédents, cette compilation offre aux fans inconditionnels des titres que d’autres artistes auraient placés sur You Tube. Cet album a le mérite de révéler les rouages d’une musique qui, objectivement, est du folk électrifié. Le disque est plaisant, mais sans surprises, et la recette quelque peu éventée.

On a l’impression sur plusieurs titres de cette compilation d’être plus proches de Bruce Springsteen que de Black Flag, ce qui n’est finalement pas plus mal, mais constitue une preuve supplémentaire que l’effet nouveauté n’agit plus. Pour l’anecdote, le dixième titre, Boxer, est traité façon reggae, avec des chœurs dignes des artistes jamaïcains, et le onzième, Once Upon A Time, sonne gospel. Une bizarrerie qui ne changera pas l’impression de bric et de broc de ce volume de faces B de singles, dont l’acquisition s’avère réservée aux spécialistes.

Bernard Lenoir L’Inrockuptible 2

On se méfie des compilations, mais elles sont un outil indispensable à l’amateur de musique, surtout lorsqu’elles sont réalisées par un personnage aussi indiscutable que Bernard Lenoir. Celle-ci est tout simplement un évènement musical.

Bernard Lenoir fut animateur de radio, et il sut pendant plus de 30 ans donner une place au rock et à la pop sur les ondes FM de France Inter. Ses émissions furent, pour plusieurs générations, un rendez-vous attendu avec fièvre et intérêt pour écouter ce qu’il nomme : « une musique par comme les autres ». Rares sont les personnages des média à avoir une une telle importance pour le public avide de nouveautés anglo-saxonnes, en particulier sur le service public, malgré l’explosion des radios locales et privées. Pour les gens qui ont eu 20 ans dans les années 80, il y eu Feedback de Bernard Lenoir sur la FM et à la télévision Chorus d’Antoine De Caunes, dont on attend encore avec impatience la réédition des archives.

L’auditeur exigeant trouvait chez Bernard Lenoir une source d’information pointue et une playlist au fait de ce qui se faisait en rock et pop. Combien d’entre nous n’ont pas enregistré les émissions sur K7 ? On réécoutait des vieilles K7, et il y  a maintenant cette compilation pour remplacer cet usage semi-illicite. Il ne s’agit pas d’une archive inexploitée, mais d’une sélection de titres qui caractérisent le mieux ses émissions de radio et leur atmosphère. Nous voici prêt, en écoutant ces 2 albums, à plonger dans l’histoire du rock. La première surprise est que ces titres ont bien vieillis, pas mal pour un choix de singles  pop et rock. Cette compil ne sent pas la nostalgie, on redécouvre des groupes d’hier et on prend plaisir à l’écoute de ces deux CD qui comportent des titres qui dans l’ensemble pourraient être sortis en 2013. Ce numéro deux fait bien sûr suite à un numéro un sur lequel figurait des locomotives comme Cure et Joy Division. Sur ce volume deux, pas de locomotives, mais une sélection qu’il suffit d’énumérer pour vous convaincre de l’achat de ce disque : On y  trouve entre autres des singles de  Pulp, The Chameleons, Patatas Fritas, Sonic Youth, Lambshop, Eels , Elliot Smith, Divine Comedy, The Go-Betweens, Supergrass, Aztec Camera, The Charlatans, Felt, Morissey, Lemonheads, Emiliana Torrini, et plus généralement deux heures de musique différente, celle que nous affectionnons à la rédaction d’indiepoprock . Si vous avez aimé notre playlist de 2013, vous aimerez cette compilation historique. A noter une perle rare, le duo Nick Cave et PJ Harvey, qui n’est pas l’un des titres les moins convaincant de cette compil.

On ne peut faire qu’un reproche : le choix des artistes francophones, qui sont représentés de manière discutable par Katherine et Little Rabits, mais dont les titres s’intègrent bien au climat général de ces disques, et on peut argumenter que le rock français n’était pas le propos de l’émission.

Specter At The Feast – BRMC

Pour son retour sur un label, en l’occurrence Abstract Dragon, Black Rebel Motorcycle Club signe un album honnête, sans surprise, marqué par la patte inimitée du groupe de San Francisco.

Il faut bien l’avouer, si nous ne sommes pas déçus par cette septième livraison discographique, BRMC peine à se renouveler : pas de grands changements par rapport à leurs disques précédents, pas de rupture ni de révolution, si ce n’est un premier morceau instrumental qui n’apporte rien et qu’on est pressé de voir finir. Cet album oscille entre morceaux calmes et morceaux plus agressifs, donnant une allure un peu décousue à l’ensemble . Reste que la facture est honnête et que l’on écoute l’objet avec plaisir en retrouvant ses marques au fur et à mesure. On retrouve sur ce septième album des ballades presque country (Returning) ou blues (Some Kind OF Ghost)  et des titres rentre-dedans, pleins d’énergie,  dignes de leurs premières heures (Hate the TasteRivalTeenage Disease) . Cette dichotomie culmine avec le très contemplatif Sometimes The Light, une très belle mélodie appuyée sur un orgue dans une ambiance d’Église. Le titre le plus intéressant est selon nous le dixième, Funny Games, qui sort de l’optique garage rock sur fond de blues pour ouvrir sur un riff stoner des plus efficaces et qui va bien avec la personnalité de BRMC . Il est suivi de l’apocalyptique Sell It, morceau lent et tout en tension . Peut-être une voie à suivre pour la suite de leurs aventures musicales et discographiques. Pour le dernier de ces douze titres, le groupe revient aux ballades avec Love Yourself. Jolie ballade, l’un des trois visages que nous donne BRMC de leur musique. Trois visages, il y en a pour tous les goûts, ceux qui préfèrent le visage garage-rock étant rassurés par le corps de cet album manquant de cohérence.

Il faut peut-être voir dans cette tonalité mélancolique qui représente la moitié du disque l’influence d’une triste nouvelle dans la vie de ce groupe, à savoir le décès de Michael Been, le père de Robert Levon Been de BRMC, qui était également membre du groupe The Call dont BRMC reprend ici le titre Let The Day Begin.

Metz – Metz

On avait envie de passer en 2014 avec un peu de bruit et de fureur. Metz est le groupe idéal pour mener à bien une guérilla contre ses voisins qui aspirent au calme.

Metz est le nom d’une ville de l’est de la France, c’est aussi celui de ce trio canadien signé en octobre 2012 par le label Sub Pop. Il pratique un noise rock rapide et débridé, virant au punk et misant tout sur l’énergie.

De l’énergie, les trois compères en ont, et nous martyrisent les oreilles avec leur compositions courtes et speedées. Leur musique est a-mélodique, des mélodies il n’y en a point, le chanteur est de la veine des hurleurs et il clame ses textes à la manière d’un groupe de hardcore punk. Voilà pour situer ce que vous allez entendre si vous vous procurez cet album bruyant et réjouissant.

Nous ne sommes donc pas chez Nirvana, issu du même label, dans un alliage de beauté et de bruit. Les guitares sont dissonantes et pleines de distorsion, le bassiste est surexcité et balance quelques notes avec fougue et la batterie mène l’ensemble avec conviction.  On a rarement entendu une telle rage et un tel niveau sonore en rock, il faut voir du côté du métal pour entendre autant de décibels, mais en rock, non, ce genre d’extrémistes musicaux ne courent pas les rues. Cet album est enregistré dans l’urgence, on ne sait pas de quoi sera fait l’avenir de ce groupe, alors il faut déguster dans l’instant.

Bloodsports – Suede

Il est des reformations qui réconfortent les fans, d’autres qui réparent une injustice, mais celle là n’apporte même pas le plaisir de réécouter un vieux groupe.

Suede, qui portait haut le flambeau de la Brit Pop dans les années ’90, s’est reformé en 2010 et accouche d’un nouvel album avec ce « Bloodsports ». Allons-nous retrouver le charme d’antan, les faux airs de David Bowie, les hits fracassants et l’énergie du groupe ? Hélas, rien de tout ça, mais un album catastrophique et plus que décevant. Suede a tout simplement réalisé un album de variété, prouvant que cela n’est pas une spécificité hexagonale et que les anglais en sont capables.

Pourtant, cette reformation était louée par la presse écrite, qui nous a bien fait saliver, et Suede nouvelle version était programmé lors du festival des Inrocks en novembre 2013, le journal Le Monde jugeant même le nouvel et sixième opus du groupe « très digne ». Nous ne partageons pas cet avis, cet album n’est pas à la hauteur de leur passé glorieux et le combo s’en tire moins bien qu’un Placebo. Avec  Barriers, le premier titre de « Bloodsports », Suede lorgne sans vergogne vers U2.Voilà pour l’entrée en matière. Nous avons continué l’écoute, et le malaise ne s’est pas dissipé avec Snowblind. Du temps de sa splendeur, le groupe n’avait pas une aussi grosse production et autant de moyens pour enregistrer. Hélas la sauce ne prend pas et les synthés de Sabotage ne font qu’ajouter à l’emphase de la voix de Brett Anderson, très énervante. Sur le titre suivant, For The Strangers, celui-ci prend des intonations à la Bowie, et c’est le meilleur titre de cet album. Il continue dans cette voie sur Hit Me mais le refrain vient tout gâcher. Puis retour à l’influence U2 sur le septième titre, Sometimes I Feel I’ll Float Away. L’album se termine enfin par trois slows dignes du pire de la FM.

Avec cet album, Suede rejoint Elton John à la rubrique des énigmes de la pop music.