Nothing – The Great Dismal

Sorti la dernière semaine d’octobre, le nouvel album du groupe de shoegaze de Philadelphie explore les thèmes de l’isolation, du mal-être et du comportement pour le moins curieux de l’être humain. Tout ça avec une efficacité bien américaine pour ce qui est de la musique.

Cela ira bien comme bande-son de notre confinement et de la crise sociale et économique qui l’accompagne, car nous aurons au moins un excellent album à écouter chez nous à défaut de voir des gens.

C’est donc du shoegaze américain. Je précise leur nationalité car du début à la fin de ce disque, si nous sommes dans les mêmes brumes et la même sensibilité que leurs homologues britanniques, ces brumes sont d’une autre teinte et il y a un côté costaud dans leurs morceaux.
Le disque commence par le très calme A Fabricated Life, qui pose dès les premières notes son climat de recueillement suivi du lyrisme de son refrain. Savourez-le comme vous savourez de la Dream pop ou un vieux Pink Floyd. Au deuxième morceau, les affaires démarrent : une batterie dansante, des guitares sales et une voix qui flotte au-dessus. Il y a des subtilités de production comme une sample vocal au début, un roulement électro ici et une partie de basse tranchante. Ce morceau porte le nom de Say Less. Le titre qui suit, April Ah Ah, est superbe et les guitares sont grosses, suffisamment pour ne pas rester assis en l’écoutant. Au milieu il y a un passage plus dépouillé, là encore signe d’un travail des morceaux. Catch A Fade qui lui succède est plus guilleret et plus évident, et contraste avec ce que nous avons entendu précédemment du moins au début du morceau car à la troisième partie nous retrouvons avec plaisir leur gros son et l’intensité caractéristique ce disque. Le cinquième revient aux choses sérieuses et a une grosse patate, tout en faisant cohabiter guitares subtiles avec le chant. Surprise avec le suivant, Bernie Sanders, plus agressif que le reste, grosse basse pour commencer, guitares entêtantes. On revient à du très lourd avec In Blueberry Memories, qui va vous remettre en mouvement si vous vous étiez posé sur le canapé.

Ensuite c’est un moment contemplatif qui se termine en explosion et qui se nomme Blue Mecca et qui est magnifique. On passe alors à un titre très métal qui s’appelle Just A Story. Dans la même veine,Ask The Rust et son refrain fait mouche d’entrée.

Avec « The Great Dismal », Nothing signe un coup de maître, qui se termine dans une relative sérénité avec, The Dead Are Dumb, en dépit d’une batterie solide. Construction classique pour un morceau qui clôture l’album par une touche plus légère.

Rien à jeter sur ce disque qui redonne toutes ses lettres de noblesse à un genre qui, petit à petit, revient au goût du jour. Dans les circonstances actuelles, il n’y aura pas beaucoup de disques à se mettre sous la dent alors ne boudez pas celui-ci.

The Sherlocks – Under The Sky

The Sherlocks est un groupe de jeunes britanniques originaires de Bolton Upon Deame près de Sheffield. Nous les avions découverts lors d’un concert dans la capitale de la France et avec quelques singles qui décoiffaient puis l’album Live For The Moment de 2017

Nous l’avions chroniqué car nous l’avions trouvé renversant. Puis nous n’avions plus eu de leurs nouvelles. Ce n’est qu’en nous rendant chez un disquaire comme tout un chacun que nous nous sommes aperçus qu’un deuxième album du nom d’Under The Sky était disponible dans les bacs depuis 2019. C’est donc avec un certain retard que nous vous le mentionnons et surtout que nous l’écoutons.

Ce qui ressort justement à l’écoute de leur disque c’est que c’est devenu plus conventionnel même si l’on retrouve leurs grandes qualités mélodiques. Mais tout est au même tempo, qui est celui de centaines de disques de rock, mis à part le titre qui donne son nom à l’album. Ce que l’on note aussi, c’est la performance vocale de leur chanteur, dont les vocalises peuvent énerver par moment, et l’apparition sur ce deuxième disque  d’une lead guitar mélodique qui se pose autour du chant. Bon, ce système est bien vu. Ils ont manifestement changé de catégorie pour devenir plus mainstream. Mais comme nous attendions ce deuxième album, nous vous en parlons dans nos colonnes.

Il y a quand même des morceaux qui nous rassurent sur cette acquisition, et qui sont dans la manière de leur album précédent, comme le deuxième titre NYC, le troisième qui se nomme Waiting, le quatrième Magic Man qui est superbe, et le neuvième Now And Then. Mais il y en a d’autres qui sont énervants, même si ce n’est jamais désagréable ni mauvais, seulement commercial. Il faut s’attendre à les voir jouer dans des salles bien plus grandes que les cafés concerts où nous les avions appréciés et où ils étaient à l’aise en toute simplicité. C’est cette simplicité d’ailleurs qui nous avait plu chez eux et nous avait amené à les rencontrer pour une interview que vous retrouverez sur notre site.

Sonic Boom – All Things Being Equal

Peter Kember, est un musicien et producteur britannique (MGMT, Panda Bear) qui a été membre de groupes (Spacemen 3, Spectrum et Experimental Audio Research) et qui fait des trucs tout seul sous le nom de Sonic Boom.

Il aura fallu attendre 31 ans pour que Peter Kember revienne aux affaires sous le nom de Sonic Boom. Un disque que certains diront expérimental, mais qui est surtout très anglais. Et ce que Peter Kember fait avec des machines, d’autres, dans cette île connue pour sa musique pop-rock, le font avec des guitares et une batterie.

On a donc affaire à un album accessible, fait de mélodies enfantines jouées au synthétiseur, d’un chant maitrisé, avec un beau timbre de voix médium même lorsqu’il se contente de réciter un texte sur des boucles. Le son est limpide et n’a rien d’agressif ni de distordu. On peut l’écouter en terrasse ou sur la plage derrière des lunettes de soleil par ce temps d’été.

L’album commence par Just Imagine, un titre qui n’est pas loin de Kraftwerk. C’est ultra-répétitif et la mélodie rentre bien dans la tête. Vient ensuite un titre avec des sons gargouillants de synthé, et une belle voix, qui porte le nom de Just A Little Piece Of Me. Nous aimons ! Things Like This, qui arrive en 3è sur ce disque, swingue terriblement pour de la musique électronique, on dirait un morceau des années 50-60 en version électronique. Plus expérimental est Spinning Coins And Wishing On Clovers, où Peter Kember récite un texte sur de l’ambiant, et ça passe, c’est captivant. Bon, peut-être parce que ce n’est pas comme ça sur tout l’album, non plus car tout le monde n’est pas prêt à écouter tout un album d’ambiant ou à pratiquer la relaxation par la musique, comme l’ont fait des chercheurs qui ont inspiré les Chill-Out des soirées techno qui permettaient au public de connaitre un moment de calme et aux consommateurs de drogues de récupérer.

Le morceau On A Summer’s Day, de circonstance, est lui plus limite. Ses sonorités asiatiques le rendent un peu barré, un peu pénible sur la longueur. Voix au vocodeur, basse synthétique et mélodie lead, Tawkin Tekno, qui lui succède, sonne plus old-school, mais ça ne fait pas de mal de revenir en terrain connu. I Can See Light Bend, lui, renoue avec une certaine complexité, intriguant par l’enchevêtrement de textures triturées, sans céder à la facilité de rajouter des beats par-dessus. C’est superbe ! Avec I feel a Change Comin On, on revient à la manière du début, avec un côté plus rock, que ce soit dans le chant ou les sons utilisés. Au final, on obtient un album bigarré, en équilibre entre passé et présent. Un disque bilan, mais sans nostalgie ni hermétisme expérimental.

LANE – Pictures of The Century

LANE, initiales de « Love And Noise Experiment », groupe angevin sort son deuxième album. Ce ne sont pas des nouveaux venus, mais d’ex-membres de groupes français respectés et ayant travaillé aux USA, les Thugs (punk no-look) et Daria (rock indépendant), qui se sont lancés dans une nouvelle aventure musicale.

Attention, ce n’est pas un album de hardcore punk, même s’il y a deux-trois titres fast-tempo qui tapent dur, mais quelque chose de plus, conciliant grosse patate et chant mélodique, et qui fait par moments penser aux Pixies, en particulier sur le morceau qui donne son nom à l’album, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Le son est excellent, meilleur que celui de leur premier disque.

Ca commence par Discovery None, qui après une intro dissonante entre dans le vif du sujet et nous fait taper du pied à 100 à l’heure. Mais ils peuvent faire plus rapide, tout en gardant le contrôle, comme nous le montre le titre suivant, Voices, qui va réveiller le punk en vous ! Par contre après cette furia vient un morceau plus sophistiqué, avec de belles parties de guitare et un refrain, So Many Loves, qui est superbe. Baisse de régime avec Electric Thrills, presque une ballade, qui nous emmène dans une certaine tristesse, mais comme dans les films ça se termine bien avec une guitare bien sentie. Après ce passage mélancolique revient un rock rapide comme ils savent le faire. Le chant est un peu étrange, mais ça passe. Plus intéressant est Life As A Sentence, qui, sur une batterie martiale déroule ses arpèges et nous propose une grosse fuzz et un long passage instrumental qui nous plait bien. Retour au punk avec Sing To The Last, mais il y a ce chant si particulier et cette construction du morceau. Bon, c’est du Thugs, clairement. Jeune lecteur, voilà l’occasion de te pencher sur ce groupe français qui a mis tout le monde d’accord à l’époque où il était en activité. Plus original est le morceau Family Life, plus pop, tout en restant teigneux, si on peut oser ce terme. Par contre le texte n’est pas pop, critiquer le Charity Bizness n’est pas grand public. Terrain connu avec le morceau qui lui succède, Black Gloves, qu’on a l’impression d’avoir déjà entendu autrefois. Last Generation, lui, n’est pas du tout surgi du passé, et nous porte vers des paysages et des climats intéressants avec une longue fin instrumentale.

LANE est aussi capable de morceaux lents, ce qui vous laissera le temps de respirer, comme le prouve ce It’s Only Love, qui est tout sauf du punk, même la basse est d’ailleurs. Ce morceau est le plus accessible de ce disque. Par contre, on tombe sur du hardcore avec Lollipop And Candy Cane, qui nous ramène à leur premier album. On termine par une grosse claque avec un morceau magistral tant au niveau du son que de l’inspiration, Pictures Of The Century. C’est la conclusion et elle est sans appel : ils sont bons et nous avons pris plaisir à écouter cet album. Nous espérons qu’il en sera de même pour vous.

Second Hand Sound – Burnout

En cette période de flottement et d’incertitude pour les industries culturelles en général et la musique en particulier, l’actualité n’en reste pas moins foisonnante. Au milieu, un mini-album 5 titres d’un groupe indé de Nashville, Second Hand Sound.

Leur nom semble être un bon programme, mais leur son n’est pas de deuxième main. Il est actuel, malgré des tics rétro à la batterie ! Ils ont aussi un côté rock héroïque, bien produit et impeccablement joué.
Le EP débute par le titre Pocket Change, qui pourrait donner une fausse idée de l’ensemble car c’est un morceau rock tout ce qu’il y a de classique. Mais avec le second, It’s Alright, c’est l’éblouissement. Ce morceau est dansant, terriblement efficace avec ce mixage aéré qui laisse paraitre basse et batterie sans les recouvrir d’un mur de guitares. Guitares aériennes s’il en est. Le seul reproche à faire à ce super single, sa durée, trop étirée (5 :01).

Le titre suivant, Balloons, n’est pas en reste, malgré son côté plus brut et la simplicité de ses guitares. Ce qui fait deux excellents morceaux. Et le groupe continue sur cette bonne voie avec Kayla Klein, notamment avec son refrain imparable. Sur ce titre aussi les guitares sont top. C’est également le cas sur le dernier morceau, Where You Put Your Love. Le chant est nuancé, même si le gars a une voix puissante. Il s’appelle Sawyer Estok, et ne les ayant pas vus sur scène nous ne pouvons pas dire grand-chose de ses performances en live.

Ce que nous pouvons dire, en revanche, c’est que ce mini-album est fort bon et qu’il comporte des titres super forts ! Ce groupe est actif depuis 2018 et les musiciens se sont rencontrés à l’université de Belmont, et nous espérons bien les voir en live après les vacances d’été.

Mathias Korn et Ariel Sharratt – Never Work

Ce duo de vocalistes est né d’un groupe indie qui s’appelle The Burning Hell, dont ils sont tous deux membres en tant qu’instrumentistes. Ils ont sorti au printemps ce nouvel album de folk rock. Guitare et chant en sont la charpente. Ils nous proposent des chansons intimistes, belles et agréablement chantées.

Ce qui frappe, c’est la beauté du chant à deux voix, masculine de Mathias Korn, et féminine d’Ariel Sharratt, en particulier sur le titre I Don’t Mind Failing et sur le premier titre de l’album, qui lui donne son nom, Never Work, exceptionnel. Mathias Kom est à l’écriture mais il trouve en sa comparse féminine l’alter ego idéale pour donner vie à ses compositions.

Il entre de suite dans la tête et ne vous quitte plus, on se surprend à fredonner en cours d’écoute. Le second titre, Monitors, montre les capacités vocales d’Ariel Sharratt, le tout axxompagné d’un basson et d’un piano. Viens en troisième position un duo, avec un refrain qui s’envole.

A notre grande surprise, le titre qui vient ensuite, The Rich Stuff,  voit surgir une guitare électrique en plus de l’acoustique. Les voix sont en avant et nous entrent dans l’oreille tandis que les instruments sont en arrière-plan. Two Jeffs est simple et superbe, les deux vocalistes sont vraiment à l’aise, les mélodies coulent comme une rivière d’eau claire qui nous rafraichit les sens par ces temps difficiles. On entre dans le traditionnel avec The Robots Versus Mrs Patel, qui nous fait bien plaisir car ce titre est une merveille.

Alors se produit l’inattendu, un titre live, avec une longue introduction parlée, qui porte le nom de Talking Gig Economy Blues, qui se termine par un tonnerre d’applaudissements. Et nous n’en restons pas là, avec le magnifique I Don’t Mind Failing, signalé au début de notre chronique, et reste le meilleur titre de cet album. Aucune chanson à mettre de côté, parcours sans fautes pour cet album folk parfaitement représentatif du paysage américain actuel du genre. De l’authentique, de la qualité, que demander de plus ?

The Coathangers – The Devil You Know

Ce sixième album du groupe féminin d’Atlanta de garage-punk est sorti il y a un an mais nous ne l’avons découvert que lors de leur récent passage en concert dans la capitale et il aurait été dommage de le passer sous silence. Il vient après l’excellent « Noisebleed Weekend » que nous avions longuement écouté.

The Coathangers sont en activité depuis 2007 et, depuis leur deuxième album, sur le label Suicide Squeeze. Le nom du groupe fait référence à une méthode rudimentaire d’avortement. Leur version du punk est fraiche, mélodique, pas oppressante. Le chant est assuré à tour de rôle par la guitariste Julia Kugel et la batteuse Stephanie Luke, la bassiste Meredith Franco restant discrète.

Le disque commence par le titre Bimbo qui montre une nouveauté dans leurs compositions, à savoir l’alternance d’une partie légère et d’une partie plus violente, ce qui surprend à la première écoute. On retrouvera cette formule tout au long de l’album.

5 Farms, est speed, entrecoupé de passages rigolos et inattendus, ce qui apporte une originalité à un swamp rock conventionnel. Le suivant est du garage, avec un refrain hurlé plus que chanté. Il se nomme Crimson Telephone. Arrive ensuite un titre fort comme elles savent le faire, plus dans leur style habituel, et Hey Buddy, est l’une des perles de l’album. Et elles ne s’arrêtent pas là, on enchaine sur Step Back, lui aussi excellent avec son refrain plein de « ouh ouh ouh » et sa rythmique bien sympa. Elles montent d’un cran avec Stranger Danger qui est le « tube » de l’album si l’on peut utiliser cette expression. Lui aussi reprend la formule couplet cool, refrain violent. Notre préféré de tout « The Devil You Know ».

On passe ensuite à du punk plus classique mais néanmoins efficace car entre de bonnes mains avec Fuck the NRA qui traite du lobby des armes aux USA. Elles savent le faire comme le montrait déjà leur chanson Make It Right. Moment rare où elles crient leur rage. Memories, qui lui succède, est plus dans la veine de l’album précédent, pour notre plus grand plaisir. Très bon morceau. Vient alors un autre morceau « tubesque », Last call, qui nous ravit, et qui est dans la manière de ce nouvel album, même s’il commence doucement. Stasher, le dixième titre, détonne par son chant suraigu et sa guitare note à note. Ce morceau fait maquette. Elles terminent en beauté avec une ballade très calme, Lithium. Normal, c’est une ballade. Nous avons presque les larmes aux yeux !

Bon, dans l’ensemble, à part un morceau, il n’y a rien à jeter, et encore, le morceau en question est drôle.

Soucoupes Violentes – In & Out

Voici un excellent album de rock aux influences sixties garage réalisé par des Parisiens, les Soucoupes Violentes, qui creusent leur sillon avec plus ou moins de bonheur depuis 1984, date à laquelle est sorti leur premier « EP Mercenaire », tiré à 1000 exemplaires. Ils ont figuré de 1989 à 1991 sur le légendaire label New Rose. Contre toute attente ils sortent en juin 2019 cet album, » In & Out », qui les place dans le peloton de tête des frenchies.

Composé dans une vieille ferme du Tarn et Garonne,l’album a été enregistré en 8 jours par le couple Stéphane Guichard (chant et guitare) et Elsa Sadet (claviers), rejoints par un bassiste, Nick, et un batteur, sous la houlette de l’ingénieur du son Jean-Paul Vitori. Il est à la fois classique et sixties, par son orgue caractéristique au charme fou. Pas ramollo sans être speedé, ne vous attendez pas à de la musique new-age pour méditation matinale ! Mais ce qui frappe à son écoute, c’est la qualité des textes en français, sombres et désabusés.

Le disque débute par Pas Pour Eux qui ressemble à un manifeste et à un avertissement. On a affaire à des indépendants revendiqués et intransigeants. Le morceau paraît sorti tout droit d’une compilation garage.

En deuxième position sur le CD,  Tout Ce Que Je Touche suinte le rock, dans ses paroles et grâce à son magnifique solo de guitare.

Troisième morceau, la meilleure chanson de ce disque selon nous, Je Ne Sais Pas Faire, réflexion sur le destin de l’artiste dans une société qui a d’autres « valeurs ». Superbe titre dont ons’approprie très vite les mots le. Suit une petite séquence en anglais sur une rythmique hésitante d’abord pour un morceau qui n’apporte pas grand-chose, ni bon ni mauvais. Le suivant, Stand By Me, nous plait davantage, tout en restant assez anecdotique.

Après ce moment anglophone, les Soucoupes Violentes reviennent à la langue de Molière avec une belle chanson énigmatique, J’Eatsi Là. Un titre prompt à donner de quoi réfléchir aux gens trop ambitieux.  Musicalement, la partie de claviers sur fond de guitare sèche est superbe. Un clavier que l’on retrouve sur le titre suivant, Silly Thing, qui nous fait penser aux Kinks. Ils restent dans cette veine avec Walk The Line, taillé sur mesure pour d’éventuels concerts.

KO Par Terre qui lui succède, est touchant encore une fois par ses paroles qu’on devine ne serait-ce qu’en partie autobiographiques. Ca ne respire pas la gaité, mais que l’album existe est déjà en soi un miracle.

Le dernier morceau du disque s’intitule Les Poules Avec Des Dents et c’est une chanson idéale pour les fins de journées, moment où l’on fait le bilan. Bilan d’un parcours d’artiste, long, cabossé mais qui a du sens.

Cet album qu’on peut considérer comme une façon de refermer des plaies brille avant tout par sa noirceur, mais il s’inscrit avec beaucoup de dignité dans le paysage du rock français.

Pixies – Beneath The Eyrie

Les Pixies sortent là leur septième album. Vous vous demandez quel peut être l’intérêt de ce groupe au passé glorieux en 2019 ?

Il faut zapper la première plage du disque, peu convaincante, pour entrer dans le vif du sujet. Quel bonheur que ce Graveyard Hill suivi immédiatement par le non moins efficace Catfish Kate ! Il y a également des titres plus posés comme Ready For Love et Bird Of Pray, qui n’en sont pas moins agréables. Notons aussi le très beau Silver Bullet qui vous fera allumer les briquets ! Dans ce défilement de beaux titres, on se demande ce que le bourrin Saint-Nazaire vient faire. Il tombe comme un cheveu sur la soupe. Mais ils sont capables de jouer du rock’n’roll primaire aussi. Un autre titre fort de cet album est le Long Rider qui se cache en septième position malgré son chant qui nous a paru étrange au début avant que survienne un refrain à la Breeders qui nous fait sauter sur le canapé.

Dans l’ensemble, nous avons affaire à un grand disque de la part d’un groupe mûr qui maitrise son sujet. Il a longtemps tourné sur la platine avant que nous nous décidions à vous en parler. Nous avons pu ainsi longuement l’apprécier et l’écouter en profondeur. Black Francis et ses acolytes sont en forme et pas du tout ramollis par l’âge. Si vous n’avez qu’un seul album de rock à acheter cet hiver, par exemple pour les fêtes, c’est celui-là.

Métro Verlaine – Cut-Up

Nous ne serons pas en panne de musique ! En effet quelques jeunes groupes se lancent dans l’aventure du rock et nous proposent des disques qui feront notre bonheur et se révèlent brûlants et essentiels.

« Cut-Up », le premier album de Métro Verlaine est de ceux-là. Produit par Charles Rowel, ce groupe d’Evreux en Normandie fait dans un post-punk ouvertement inspiré de Joy division, en version sauvage et avec des textes bourrés de références (Manchester, Richard Hell). Cet album a un son particulier et la guitare mène la danse.

Il commence par Polaroïd, morceau à la batterie primitive sur laquelle la chanteuse du groupe balance un texte poétique, entrecoupé d’interventions de guitare qui lui répondent. En deuxième position vient  Manchester, sorti en single et diffusé à la radio, manifeste post-punk où ils déclarent leur passion pour la ville qui a vu naitre le groupe Joy Division et des tas d’autres groupes de rock. C’est avec ce titre que nous les avons remarqué. Il est magnifique. Troisième morceau, La Vague, met en valeur le chant de Raphaëlle, dans la lignée des deux précédents.

Ballade Sauvage, la bien nommée qui lui succède, prend aux tripes. Après quoi on repart tambour battant avec Crash, qui évoque la fureur de vivre puis avec Tequila Sunrise, qui synthétise ce que le groupe fait de mieux : texte bien écrit, guitares sont enivrantes. Après cela vient la référence à une autre figure tutélaire du groupe, Richard Hell, icône du punk new-yorkais de la fin de années soixante-dix . Hate, titre suivant est en anglais et c’est un des meilleures titres de l’album, plus rock’n’roll peut-être que post-punk. Codéine, quand à lui, tranche par son côté joyeux et son riff qui accroche au premier coup d’oreille, en dépit d’un propos plutôt sombre. L’album se termine par Crocodile, où la chanteuse répète inlassablement une phrase qui sonne et referme l’album sans concession.

Dans l’ensemble, c’est une réussite, il y a un son, des textes aux images fortes, une voix habitée. Ce qu’ils font est envoûtant et sombre, mais cette noirceur nous fait du bien.